ÉTHIQUE ET PRINCIPES

Les techniques du Sơn Long Quyền Thuật sont multiples, toutes les parties solides du corps sont sollicitées soit pour la défense, les blocages, les parades, soit pour l’attaque, les frappes et les saisies.

L’éthique du SLQT est de n’utiliser le Võ que dans un but purement défensif et uniquement en cas d’absolue nécessité. Le maître Mộc insistait longuement sur ce point. Un disciple du SLQT ne doit jamais utiliser son art pour de mauvaises actions et il ne doit en aucun cas provoquer un combat ni s’acharner sur un adversaire plus faible. Le maître disait qu’il fallait simplement « défendre sa frontière »

Il avait reçu un enseignement traditionnel « classique » et, lorsqu’il quitta le Vietnam, il n’eut de cesse d’observer et de se confronter aux pratiquants et aux disciplines martiales issues d’autres cultures que la sienne. Ces échanges ont très vraisemblablement eu un impact sur sa méthode de travail et sa pédagogie d’enseignement.

Il affronta par exemple un disciple de maître Kawaishi, un pratiquant de judo, en combat libre et parvint très difficilement à le vaincre en le frappant à la main et en la brisant avec la technique de la foudre qui tombe du ciel contraignant ainsi le Japonais à abandonner. A l’issue du combat, le maître resta immobile et attendit que son adversaire quittât les lieux avant de se déplacer en boitant car le Japonais lui avait placé une redoutable clé de jambe. Convaincu par la grande efficacité des arts martiaux du Japon, il étudia tout leur programme et en particulier les clés et les étranglements.
Il appréciait également le fait que les écoles japonaises montraient une grande rigueur et une discipline stricte leur permettant d’enseigner à de nombreux élèves en même temps. Cependant, il prônait l’auto-discipline en expliquant que chacun savait pourquoi il venait s’entraîner et qu’il n’y avait pas besoin de hurler sur les élèves ou de les punir pour qu’ils travaillent correctement.

Les Vietnamiens sont plutôt légers et fins et leur pratique martiale est adaptée à leur morphologie. Le maître Mộc constata que les occidentaux étaient plus puissants, plus lourds et plus résistants que les Viêts, il était donc inutile de tenter de les soumettre par la force pure.
La stratégie de combat du Sơn Long Quyền Thuật nécessite une grande résistance physique. Le maître expliquait que ses disciples devaient tenir une heure en combat sans s’arrêter. Il prenait en exemple les pratiquants de boxe anglaise qui, je cite, « n’utilisent pas beaucoup de techniques mais sont très solides et capables de combattre longtemps sans se fatiguer ». A Paris, dans les années 60, la Fédération enseignait dans une salle de boxe ce qui permettait au maître d’observer attentivement les méthodes et les comportements des boxeurs... Il nous expliquait que le courage était une des clés du combat prenant en exemple ces boxeurs qui avaient disposé dans chaque coin du ring des seaux où les combattants pouvaient se moucher et cracher durant les sparrings. Chaque soir, les seaux étaient emplis de sang et malgré cela tout le monde revenait pour combattre. C’était pour le maître un signe de courage.

La stratégie de combat du SLQT est principalement basée sur l’idée de devoir affronter un adversaire plus robuste et puissant que soi, car si l’on est capable de vaincre un tel adversaire, on est en principe également en mesure de gérer un adversaire plus faible.
Le maître Mộc mit l’accent sur les frappes destinées à briser les armes naturelles de l’adversaire, soit ses jambes, ses pieds, ses bras et ses mains, avant de chercher à atteindre sa tête ou ses organes vitaux. Il imageait sa stratégie en la comparant à celle d’une armée qui, avant de débarquer sur un objectif, bombarde et détruit les défenses de son adversaire (cf. le débarquement de Normandie). Privé de ses armes, l’adversaire ne peut plus combattre.

LES PILIERS

La souplesse, la force, l’équilibre, la rapidité et la précision sont les 5 piliers sur lesquels le vō-sinh construit sa pratique. Il s’agit de principes autant physiques que moraux.
L’idée de souplesse concerne bien évidemment le corps mais aussi l’esprit, car en combat comme dans la vie quotidienne, il faut être capable de s’adapter aux situations changeantes. La force englobe la puissance musculaire mais également le courage, la volonté et la persévérance. L’équilibre, la rapidité et la précision sont aussi des qualités physiques et morale. Le pratiquant doit accorder la même importance à chacun de ces piliers et tenter de les améliorer sans cesse.

Ces principes lient « l’externe » (le corps, les muscles, les tendons) et « l’interne » (le mental, le souffle, l’esprit) en harmonie avec les principes Âm dương (ying et yang) qui régissent les arts martiaux. Les bienfaits de cette conscience corporelle et mentale sont universels et peuvent s’appliquer à de nombreuses voies, sports, arts, métiers...

La moralité du pratiquant s’élève avec ses capacités physiques. Un maître du Sơn Long Quyền Thuật se doit d’être une personne aimable, équilibrée et bien éduquée car le Vō est un art dangereux qui nécessite de l’autocontrôle et de bonnes facultés d’analyse. Ce n’est pas un jeu et mal utilisé, cet art peut avoir des conséquences irréversibles.

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LES POSITIONS

Dans le SLQT, les positions sont plutôt basses à l’instar des écoles du Nord. On parle couramment des jambes du Nord et des bras du Sud car le Nord est constitué de régions montagneuses et escarpées, procurant à leurs habitants des jambes fortes, alors que le Sud possède de nombreuses étendues d’eau où l’on rame, où l’on pousse des perches, où l’on retire des filets, ce qui renforce le haut du corps. 
Les positions sont en quelque sorte les fondations du Vō et elles sont entraînées longuement, tout d’abord de façon statique, puis en déplacement. Outre l’utilité martiale de ces postures, ce travail renforce tout l’organisme et est très bénéfique pour la santé. La position de combat typique du SLQT est celle du dragon qui sort de la mer et du tigre à l’affût devant sa grotte (Hiện long tấn hổ) symbolisée par la main avant ouverte, tranchant face à l’adversaire (le dragon) et le poing arrière fermé à la hanche (le tigre) avec les jambes en position Đinh tấn.
Il y a des positions dites hautes, moyennes ou basses, qui peuvent se combiner à l’infini.

Trung Binh Tan

LE PROGRAMME TECHNIQUE

La technique du Sơn Long Quyền Thuật est enseignée selon un programme précis dont la difficulté augmente au fur et à mesure de l’étude.
La première partie est la préparation physique, ou l’échauffement, qui est un ensemble d’exercices de renforcements, d’assouplissements et de travail cardio-vasculaire. Plus le pratiquant est novice, plus le temps d’échauffement est long car il est nécessaire de développer les compétences physiques permettant d’effectuer les mouvements de Vō. Par la suite, lorsqu’il connaît mieux la technique, le temps d’échauffement diminue et le vō-sinh entretient son corps par la pratique.

Aux temps anciens, la transmission du Võ était orale afin d’en préserver le secret et pour éviter que la « méthode » ne tombe dans de mauvaises mains. Le SLQT perpétue cette tradition et ne transmet le programme technique écrit à un pratiquant que lorsqu’il a passé l’examen d’élève-professeur et qu’il devient symboliquement interne à l’école en revêtant le costume marron.

L’enseignement traditionnel du Sơn Long Quyền Thuật comporte : des positions, des séries de mains, des séries de coups de pieds, des enchaînements combinés, des thảo, des applications et endurcissements, du combat, des acrobaties et des roulades, des armes, de l’auto-défense, de la santé et des respirations.

LES SÉRIES DE COUPS DE PIEDS

Les coups de pieds sont étudiés spécifiquement à part en une progression graduelle. On peut frapper avec les pieds dans toutes les directions et aux trois niveaux : bas, moyen, haut. Le Maître préconisait de beaucoup entraîner les jambes pour les rendre aussi habiles que les mains. Les coups de pieds peuvent être exécutés lentement : en équilibre, en contraction, en position Đinh tấn, en position Trảo mã tấn ainsi qu’en déplacement. Le Maître comparait les frappes à « deux fils électriques qui se touchent ». Une grande souplesse et un très bon équilibre sont nécessaires à leur exécution correcte. Comme c’est le cas de toute la technique du SLQT, les mouvements de jambes doivent être répétés inlassablement de façon progressive afin de pouvoir bouger naturellement et sans effort. Les coups de pieds servent à bloquer des frappes, à briser des membres ou à atteindre les points vitaux de l’adversaire.
Par exemple, le Maître Mộc nous encourageait à éteindre et allumer les interrupteurs ou les boutons d’ascenseur avec les pieds en contrôlant bien nos gestes, toutes les parties solides du pied peuvent être utilisées selon les opportunités.

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LES SÉRIES DE MAINS

Ce sont des séries de mouvements où l’on frappe uniquement avec les bras et les mains afin de prioriser le travail des membres supérieurs. 
La première série comporte 10 mouvements et s’exécute en position Lập tấn (position de l’unité ou du rassemblement de l’énergie) ; la deuxième série utilise la position Trung bình tấn (position moyenne) ; la troisième s’exécute dans plusieurs directions avec des changements de position ; la quatrième se pratique à deux et comprend des endurcissements ; la cinquième se travaille également à deux mais ajoute des déplacements, des sauts et des postures d’enracinement ; la 6ème série est constituée de défenses sur des attaques au couteau ou avec un bâton.
Les trois premières séries font partie du programme des élèves, la 4ème est étudiée à partir du niveau élève-professeur et les suivantes ne sont étudiées qu’en commission technique.
Les mouvements des séries commencent toujours par une parade ou un blocage en accord avec l’éthique d’utilisation purement défensive du Sơn Long Quyền Thuật.

série mains

LES APPLICATIONS ET DES ENDURCISSEMENTS

Dans l’école SLQT, les võ-sinh doivent connaître l’application réelle de toutes les techniques qu’ils étudient, par conséquent, le travail avec un partenaire est primordial.
Pratiquement toutes les techniques entraînées dans le vide, à l’exception des techniques létales, peuvent être étudiées en application. Les pratiquants doivent doser la force de leurs frappes pour éviter de blesser leurs partenaires. Les mouvements sont tout d’abord isolés, puis progressivement on peut appliquer des enchaînements plus complexes et augmenter la vitesse de frappe. Ce travail permet de viser des cibles concrètes et d’adapter les gestes en fonction de la distance et de la taille du partenaire. C’est un préalable aux études de combat où l’on acquiert des automatismes et des réflexes en plus de l’endurcissement du corps.

Certaines écoles chinoises, japonaises ou autres pratiquent des endurcissements (chemise de fer) soit en frappant progressivement des surface solides (sable, pierres, pièces de monnaie) soit en se frappant le corps avec des objets spécifiques (baguettes de bambou, rotins).

Le maître Mộc préconisait d’éviter les exercices dangereux pour le corps, il estimait qu’il était plus efficace de frapper sur les « surfaces » molles et fragiles que de risquer de briser ses os sur une « surface » trop dure. Il nous encourageait à travailler progressivement avec un partenaire pour apprendre à bien viser les points d’anatomie et s’endurcir mutuellement. Par sécurité, certaines frappes ne sont exécutées que dans le vide car elles sont trop dangereuses. Certaines techniques sont légèrement modifiées en application deux par deux pour ne pas blesser son collègue ou pour endurcir certaines parties de son corps. On utilise également la contraction et le travail interne pour supporter les coups. Cette pratique régulière additionnée à tous les autres exercices rend peu à peu le corps très résistant.

LES THẢO

Les thảo sont des leçons complètes. Chacun des niveaux d’étude correspond un thảo et leur complexité augmente progressivement.

Les leçons commencent toujours par un salut traditionnel qui est une marque de respect, une pensée destinée à tous les maîtres ayant propagé la technique jusqu’alors. Chaque école utilise un salut spécifique permettant de l’identifier et de retrouver son origine. En général, le salut est accompagné d’une respiration spécifique et de mouvements de concentration de l’énergie avant d’exécuter les gestes de combat. Dans la plupart des saluts traditionnels, on retrouve le geste universel de la paume ouverte dans laquelle s’appuie le poing opposé. Cela symbolise les grands principes du Võ : le vide et le plein, la guerre et la paix, le yin et le yang, l’externe et l’interne.

Les quatre premiers thảo du SLQT s’exécutent en suivant les quatre points cardinaux. Chacun détient un ou des principes importants de combat comme par exemple : comment sortir d’un encerclement ou comment attaquer les points vitaux vulnérables...

Les thảo suivants sont plus complexes et reproduisent un combat contre un ou plusieurs adversaires. Les thảo originels possèdent un poème qui donne des indications sur la façon de bouger, de frapper et de se comporter. Certains thảo, comme par exemple le 6ème, sont directement inspirés des comportements d’animaux et en l’occurrence la grue.

Traditionnellement, certaines écoles de Võ n’étudient que les thảo (quyền) et ce fut le cas du Maître Mộc dans sa jeunesse. Il expliquait qu’il avait adapté sa pédagogie d’enseignement aux occidentaux qui étaient moins patients que les Vietnamiens et simplifié sa méthode pour la rendre plus efficace.
Les thảo peuvent être pratiqués en force, en souplesse, en respiration, en contraction et à gauche comme à droite. Ils permettent, outre la technique, de travailler les 5 piliers, l’endurance, le souffle, etc.

thao de groupe
CTI

LES ENCHAÎNEMENTS COMBINÉS

Des enchaînements courts nommés Thế bí truyền ou enchaînements familiaux (secrets de famille) viennent compléter le travail spécifique des mains et des pieds. Il s’agit d’enchaînements courts de trois ou quatre mouvements de contres et d’attaques qui sont des stratégies utilisables directement en combat. Ce sont des courtes séquences que l’on travaille à gauche et à droite. On parle couramment d’enchaînement de jambes ou des Thế.

Mains nues

LE COMBAT

On parle plutôt d’étude de combat que de combat réel au sein du SLQT. En effet, le terme de combat réel véhicule une idée de survie où il vaut mieux stratégiquement tenter de détruire le plus vite et le plus efficacement possible son agresseur, ce qui n’est pas transposable dans des entraînements où les élèves se respectent et s’apprécient mutuellement.
Les études de combat se font sans aucune protection, sans catégorie de poids, d’âge ou de sexe. Certaines zones de frappes sont interdites : les parties génitales, les genoux, la colonne vertébrale et la tête (sauf bon contrôle). Le plus fort ou le plus expérimenté doit s’adapter à son partenaire et il est important d’éviter de blesser volontairement son collègue.

Les combats peuvent être dirigés, avec un ou plusieurs thèmes ou libre. En général, on combat à l’intérieur d’un grand cercle sous le contrôle des plus gradés, la durée des combats est aléatoire et le temps de combat est décidé au cas par cas.

L’étude du combat au sein de l’école SLQT nécessite une bonne maitrise technique ainsi qu’une bonne moralité. Le maître Mộc disait que ce n’était pas le fait de gagner qui était important mais le fait d’être courageux et intelligent. En général, il choisissait soigneusement qui affrontait qui pour éviter des débordements, cependant les combats du SLQT sont sérieux et assez poussés à haut niveaux. Les KO sont autorisés dans les bras, les jambes, au plexus solaire ou d’autres zones, du moment qu’ils ne mettent pas en péril l’intégrité physique de celui qui le subit.

LES ARMES

L’étude des armes traditionnelles dans le SLQT se fait en général après quelques années de pratique car le corps doit être formé au préalable et la base « physique » est prioritaire. 
L’arme est le prolongement naturel du corps et les postures, les déplacements ainsi que les principes de combat sont identiques avec ou sans armes. On nomme par exemple le tranchant de la main « le sabre dur » (Cương đao) car on utilise sa main exactement de la même manière qu’un sabre.

Aux temps anciens, Il existait 18 disciplines comportant l’étude des armes longues, courtes, tranchantes, souples ou par exemple le tir à l’arc, l’équitation, etc. Le Vietnam ayant développé une grande tradition d’armée populaire ou de paysans soldats, de nombreuses armes traditionnelles sont à l’origine des outils de la vie quotidienne comme les fléaux, les fourches ou encore les haches.
Certaines régions, en fonction de la géographie, des techniques de chasse, de pêche ou d’agriculture, utilisaient des armes spécifiques et certains maîtres fabriquaient eux-mêmes leurs propres armes en fonction de leur ressenti. De fait, il existe une telle multitude d’armes dans le Võ qu’il est impossible de les nommer toutes.

Actuellement, les armes modernes ont grandement diminué la pertinence de l’étude de certaines armes traditionnelles. Il n’en demeure pas moins qu’il est utile et intéressant d’étudier la manipulation de certaines d’entre-elles, ne serait-ce que pour améliorer sa dextérité et sa précision, voire pour la beauté du geste ou le lien « spirituel » de l’origine de nos pratiques. Par exemple, le premier thảo d’arme que l’on étudie au SLQT est un thảo de lance que le maître Mộc enseignait sur un rythme au tambour dont certains des sons codifiés indiquent des frappes, d’autres des piques, d’autres encore des déplacements. Ce qui nous renvoie à l’époque ancienne où les consignes des manœuvres sur les champs de batailles s’effectuaient au son des tambours. Le maniement des drapeaux et le tambour sont encore étudiés de nos jours dans de nombreuses écoles au Vietnam.

Les principales armes étudiées au SLQT sont : le bâton long, le bâton court, la lance, le sabre, l’épée, la guisarme (hallebarde), les doubles sabres courts (Song Tô). Le bois des bâtons et des lances est en rotin ce qui procure de la souplesse à ces armes.
Tout comme la technique à mains nues, la pratique des armes se fait par l’étude des thảo, des applications, et l’on peut créer des combats chorégraphiés où diverses armes s’affrontent. Chaque arme possède ses propriétés particulières, ses avantages ou ses inconvénients, selon le terrain et les circonstances. A haut niveau, certaines armes « spéciales » sont utilisées comme la lame volante (phi đao) qui était l’une des grandes spécialités du Maître Mộc. Il se servait de cette lame reliée à une corde pour cueillir les fruits des plantations familiales.

LES ACROBATIES ET LES ROULADES

Une des particularités du SLQT est l’apprentissage des roulades et des acrobaties. Ce travail permet de chuter sans se blesser, d’esquiver certaines attaques, de feinter, de se dégager ou se rapprocher de façon imprévisible d’un adversaire. Il fait partie intégrante du programme de base et se conjugue avec les mouvements de combat.

L’acrobatie développe l’équilibre, améliore l’explosivité, la coordination, la force et la souplesse. Cependant, cette partie de l’entraînement, si l’on souhaite acquérir un haut niveau, nécessite de commencer la pratique jeune pour des questions de souplesse. Les enfants apprécient particulièrement l’aspect ludique et spectaculaire des roulades et il est nécessaire d’adapter l’entraînement aux capacités des pratiquants, comme pour le reste du programme d’ailleurs.
Avec le temps et un entraînement adéquat, chacun peut parvenir à exécuter le programme de base.

L’AUTO-DÉFENSE

Un programme englobant les prises de mains, les luxations, les étranglements est également étudié au sein du Sơn Long Quyền Thuật. Ces techniques sont moins exigeantes au niveau physique que les coups de pieds ou les acrobaties mais elles nécessitent une bonne compréhension de la mécanique du corps et de l’anatomie. Là encore, à chaque niveau de l’apprentissage correspond un certain nombre de clés ou d’immobilisations.

Ce travail au corps à corps se nomme Võ tự vệ, il complète les frappes à distance et permet de réagir efficacement lors des saisies ou des tentatives d’étranglement.
Le Võ du SLQT selon l’idée de son fondateur doit être complet et aborder toutes les situations de combat. Ainsi, s’il est confronté à un spécialiste des frappes, le pratiquant du SLQT peut choisir de l’affronter en corps à corps pour l’empêcher d’utiliser ses coups et vice versa. Le Maître conseillait d’observer et de deviner qu’elles étaient les compétences de son adversaire et de mettre à profit ses points faibles plutôt que de l’affronter sur « son terrain ».

LA SANTÉ ET LA RESPIRATION

Il n’existe pas au sein du SLQT un programme de santé spécifique, progressif, comme pour les autres mouvements. On peut considérer que toute la pratique, lorsqu’elle est bien exécutée, améliore la santé de façon globale. Certains exercices de respiration sont entraînés dans les échauffements, des gestes de concentration de la force interne (Nội công) font partie des Thảo, des séries, etc. Par exemple, le maître nommait « changement d’air dans le corps » la première partie de l’échauffement avec une course légère sur place et des sauts en extension où l’on expulse graduellement l’air lors de l’atterrissage. Il faisait la comparaison avec un moteur encrassé que l’on devait agiter afin de décoller la saleté avant de l’expulser.

Il existe cependant une leçon spécifique nommée communément thảo musical car il était exécuté sur une musique traditionnelle. Cet exercice est similaire au travail lent du Tai Chi, il doit être exécuté en souplesse et le pratiquant doit lâcher prise comme s’il allait s’endormir (dixit Mộc). En principe, ce thảo est pratiqué à la fin de l’entraînement. Il est la principale leçon de santé du SLQT bien que comme énoncé plus haut, tout l’entraînement participe au bien-être et au renforcement de la santé lorsqu’il est bien compris et bien fait.

Lorsqu’on se concentre sur l’aspect « santé » des arts martiaux, on parle du travail de l’interne par opposition au travail externe qui est visible. Certaines écoles ne travaillent que l’interne (ou le Khí công), le Sơn Long ne dissocie pas l’interne de l’externe considérant que se sont deux aspects complémentaires et indissociables d’une même pratique. Il appartient au pratiquant de prioriser l’un ou l’autre de ses principes selon le but recherché.
Le Maître Mộc estimait qu’un võ-sinh devait ressentir son corps et ses besoins. Il était très attentif à son alimentation, à l’importance de la respiration, au relâchement physique et mental nécessaire à une bonne pratique et il affirmait qu’un võ-sinh compétant devait être capable de se soigner et de rester en forme longtemps s’il pratiquait intelligemment.

LES NOMS ET LES SYMBOLES

Les techniques du Sơn Long Quyền Thuật possèdent toutes un nom en Anh Việt (vietnamien antique ou classique). Le nom de la technique est important car il donne l’idée de l’utilisation de sa technique. Ainsi, par exemple, Phương dực ou « l’aile du phœnix » signifie en Anh Việt un coup de coude de même que Bàng long cước ou « le coup de la patte du dragon » est un coup de pied puissant où l’on attaque l’adversaire avec son talon. Chaque mouvement possède un nom mais lorsqu’il est placé dans un enchaînement, le nom peut changer. Par exemple, lorsqu’on glisse vers l’arrière avant de frapper avec Bàng long cước, ce mouvement devient Lão hổ thân yêu ou « le vieux tigre sage qui feint de fuir et étire sa hanche ». Toutes les écoles traditionnelles vietnamiennes utilisent les mêmes termes poétiques et littéraires. Cependant, la façon d’exécuter les mouvements peut varier d’une école à l’autre selon les stratégies propres de l’école.

CONCLUSION

Les mouvements doivent être répétés sans cesse jusqu’à être assimilés. Le Maître Mộc, en parlant de sa méthode, précisait que c’était avant tout une école pratique et non théorique, où il fallait, dixit : « parler peu et travailler beaucoup ».
A chaque niveau de pratique correspond une série de mains, une série de jambes, un thảo, des applications deux à deux, des roulades spécifiques... Il est préférable de connaître bien quelques techniques que d’en étudier trop sans pouvoir les appliquer.
Lorsqu’on atteint le niveau supérieur (Thượng Đảng), il n’y a plus aucune limite à l’étude. Un maître peut choisir de travailler ce qui lui semble utile en fonction de sa recherche. Cependant, pour garder la cohérence et l’unité technique de l’école, il est primordial de n’enseigner que le programme officiel.

On peut commencer la pratique à tout âge à condition de respecter ses capacités corporelles propres, et il est parfois nécessaire d’adapter le rythme ou la force voire la hauteur de ses mouvements à ce que notre organisme supporte.